Holmegaard Glasværk

Au début du XIXe siècle, le comte Christian Danneskiold-Samsoe, qui professe des idées progressistes, décide d'utiliser la tourbe qui trouve en abondance sur sa grande propriété comme combustible pour une nouvelle verrerie. Mais il meurt avant d'avoir pu mener son projet à bien, et c'est sa veuve, la comtesse Henriette Danneskiold-Samsoe, qui finit par construire la verrerie dans le marais de Holmegaard, en 1825.

Le premier four de l'usine est construit par un verrier norvégien, Christian Wendt, un ancien de la verrerie Hadeland. A l'origine, l'usine fabrique les classiques bouteilles vert épinard bon marché utilisées pour la bière ou le schnaps.

Après quelques années, cependant la comtesse décide courageusement d'améliorer et d'élargir la ligne de produits. Pour ce faire, elle recrute des verriers de Bohême et d'Allemagne du Sud et, en 1835, l'usine commence à produire des verres à pied et de la verrerie d'art de stylé européen classique.

Mais face à la concurrence croissante du verre suédois au début du XXe siècle, Holmegaard engage pour la première fois un designer réputé, Orla Juul Nielsen, dans le cadre d'un accord de partenariat avec Royal Copenhagen. Nielsen a pour mission de dessiner des verres assortis aux services en porcelaine d'Holmegaard. Les direction s'en explique dans une lettre, où l'on peut lire ceci "Nous avons trouvé un artiste qui partage notre désir de simplicité, notamment en ce qui concerne la forme des verres et des coupes, un artiste qui veut être au plus près de la quintessence e la forme qu'autorise la matière, qui tente d'approcher l'essence même de la forme permise par la matière, en évitant toute allusion à un raffinement excessif ou à de la légèreté artistique, mais qui dans sa pure simplicité cherche à créer le plus grand effe". L'idée que la beauté puisse passer par la simplicité est certes audacieuse pour l'époque, mais c'est elle qui donnera à la verrerie danoise sa nouvelle identité.

En 1924, l'architecte Jacob Bang rejoint le service de création de Holmegaard. Quatre ans plus tard, il est nommé directeur artistique de la maison. Ses créations sont résolument modernes. C'est le cas de ses célèbres verres Primula et Viola, qui révèlent un artiste capable d'imaginer des objets à la fois simples, pratiques, agréables au regard et au toucher. Si elles restent extrêmement rationnelles, les créations de Bang, qui sont essentiellement destinées à la production industrielle, sont aussi pétries d'humanité. Loin de l'esthétique machiniste défendue par le Bauhaus, elles on une douceur et une sensualité qui annoncent la version scandinave du modernisme qui allait se développer à partir des années 1930. Elles montrent aussi un indéfectible attachement à l'idée de beauté pour tous. Bang veut bien que les Rockeller aient des verres à pied, pourvu que Monsieur tout le monde boive dans de belles chopes à bière. A l'occasion, il crée de luxueuses pièces d'art-verres en cristal, coupes et shakers à cocktail délicatement gravés de motifs Art déco. Per Lütken, qui lui succède en 1942, va rester chez Holmegaard jusqu'à sa mort en 1998.

Au cours de ses cinquante-six années de "règne", il introduit les perfectionnements les plus récents et s'efforce de renouveler le verre à vin classique tout en restant fidèle aux procédés de fabrication traditionnels. Son modèle le plus connu, la coupe Provence (1955), montre comment il a révolutionné la verrerie grâce à ses inventions formelles. Très remarqué, ce parfait exemple du bon gout danois des années 1950 a conforté la réputation flatteuse d'Holmegaard à l'étranger. Pour Lütken, le design doit embellir la vie, et c'est pourquoi il s'attache à perpétuer dans don travail la simplicité, l'esprit d'équilibre et le savoir-faire propres à Holmegaard.

En 1968, le fils de Jacob Bang, Michael, entre à son tour chez Holmegaard. Il dessine un certain nombre de modèles à succès, notamment les élégants verres à vin Fontaine de 1987 (dont les pieds contiennent des inclusions de bulles)... Il signe aussi de la verrerie d'art et plusieurs luminaires , dont la lampe de table Parasol (1970).

D'autres desiners ont travaillé pou Holmegaard depuis les années 1980. C'est le cas de Torben Jorgensen, Anja Kjaer, Arje Griegst, Ann-Sofi Romme, Allan Scharff et Peter Svarrer. Ces créateurs nourris de la traditionnelle simplicité du design danois ont su imaginer les formes nouvells et expérimentales dont a jailli le fonctionnalisme sensuel qui est la marque distinctive du design scandinave au début du XXIe siècle.